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Démarrer les semis-hors sol : ce qui est nécessaire

 

Les plaques de culture et les godets  (par Joseph Chauffrey)

Démarrer les semis en plaques de culture (ou tout autre contenant) permet indéniablement une accélération des rotations au potager. Les semis sont ainsi réalisés alors que les cultures en place terminent leur croissance.

On peut réaliser ainsi la majorité des semis. Les seuls légumes pour lesquels on ne pratique pas les semis en contenant sont les carottes (qui ne parviennent pas à développer correctement leur racine) ainsi que les radis, pois et haricots pour lesquels l’étape de repiquage serait fastidieuse. Cependant, en tout début de saison, on peut démarrer hors-sol, certains semis de grosses graines (pois et fèves) le temps que la terre se ressuie. Semer alors les graines en poquet et remplacer les plaques de culture par des godets d’environ 8 cm de côté.

Bien choisir ses plaques de cultures

Utiliser des plaques de culture en plastique rigide (les premiers prix en plastique souple ont une faible durabilité), découpées en alvéoles étroites (3 cm de diamètre) mais profond (4,5 cm). Leur petitesse limite la consommation de terreau et leur profondeur favorise un enracinement efficace des plantules. Point essentiel à vérifier lors de l’achat, le diamètre du trou d’écoulement sous l’alvéole doit permettre le passage d’un doigt pour faciliter le démoulage des mottes. [1]

LEXIQUE (par Joseph Chauffrey)

Semis en poquets : consiste à regrouper plusieurs graines (4,5 ou 6) lors d’un semis, afin de leur faciliter la levée, celles-ci étant plus nombreuses pour percer la croûte superficielle du sol. Cette technique peut également s’avérer pratique pour le tuteurage de certaines grimpantes (haricots à rames par exemple). [2]

LEXIQUE (par Jean-Martin Fortier)

Terreau : Substrat de culture utilisé pour les semis intérieurs. Il est composé de terre mélangée à des matières végétales ou animales décomposées (tourbe, vermiculite, compost, etc.). [3]

Le compost de fumier de cheval (par Eliot Coleman)

Ce sont des années et des années de perfectionnement des techniques de culture, aussi bien sous abri qu’en plein champ, qui ont culminé dans l’art de la culture maraîchère telle qu’elle fut pratiquée par les maraîchers parisiens de la seconde moitié du XIX e siècle. Les premiers essais en matière de prolongement des saisons (en utilisant des ancêtres du châssis) remontent à la fin du XVIIe siècle. Le cadre de ces expérimentations n’était autre que le potager du roi à Versailles, où ils furent menés par M. de La Quintinie, directeur des jardins fruitiers et potagers de toutes les maisons royales, dans les années 1670 et 1680. Ce sont les suites de ces premiers tâtonnements qui ont abouti aux techniques remarquables dont disposaient les maraîchers parisiens entre 1850 et 1900.

Les planches sur couche chaude à base de fumier de cheval en décomposition, protégées par des châssis, permettaient aux maraîchers de défier les frimas et de produire des salades dès le mois de janvier, ainsi que des concombres et des melons hâtifs dès le mois de mai et juin.

Le système était durable. Aussi bien le chauffage nécessaire à la production hivernale, réalisée sur couches chaudes, que les amendements pour maintenir la fertilité du sol étaient des produits du compostage d’un sous-produit : le fumier de cheval mélangé à la paille, qui sortait tout droit des écuries parisiennes. Ce recyclage des déchets générés chaque jour par les transports fonctionnait si bien et était pratiqué de façon si générale que la fertilité du sol augmentait d’année en année, et ce malgré les niveaux de production très élevés.

Le dernier facteur impressionnant était l’énorme productivité du système, mise en évidence par les quantités de légumes produits. Les maraîchers ne se contentaient pas de nourrir tout Paris, ils exportaient aussi vers l’Angleterre ! Leur moyenne basse était de quatre récoltes par an sur la même parcelle, et il n’était pas rare que ce chiffre monte jusqu’à huit. Ce système garantissait la réussite aussi bien sur le plan technique que sur le plan économique.

Un tel niveau de production était rendu possible par les apports de fumier de cheval : de 25 à 100 tonnes pour 1 000 mètres carrés au minimum, selon le nombre de couches chaudes réalisées. Le fumier, dont la décomposition générait de la chaleur, était disposé non seulement sur les couches chaudes mais aussi dans les allées, ce qui augmentait encore la température. Quand il ne dégageait plus de chaleur et commençait à se composter, on le déblayait à la pelle et on l’utilisait pour amender le sol. D’après l’expérience d’Eliot Coleman, le compost à base de fumier de cheval et de paille est ce qu’il y a de mieux pour la culture des légumes. Beaucoup de maraîchers français, à cette époque, disaient même que c’était le seul valable.

Ces maraîchers d’antan étaient donc bio dans le meilleur sens actuel du terme, et c’est leur expérience pratique qui les amenait à l’être. Dès 1870, Vincent Gressent écrivait dans son manuel à destination des maraîchers parisiens intitulé Le potager moderne : « Les fertilisants chimiques ne répondent pas à toutes les attentes ; ils stimulent la croissance et augmentent la quantité, mais c’est au détriment de la qualité […] en principe, les ravageurs n’attaquent que les plantes faibles et malades, dont les besoins ne sont pas comblés […] J’en veux pour preuve les jardins maraîchers de Paris où l’art de cultiver des légumes a atteint sa perfection […] Dans tous ceux où on utilise beaucoup de compost et où l’on pratique rationnellement les rotations, il n’y a pas la moindre trace de ravageurs. » [4]

Sang séché et corne broyée (par Eliot Coleman et John Jeavons)

Il est possible de surfertiliser les cultures sous tunnel en utilisant des engrais fortement dosés en azote, comme le sang séché. [5] La poudre de sang séché dure trois à quatre mois. Elle est une source d’azote à action rapide, convenant aux composts lents à agir. Elle peut brûler les plantes si elle est utilisée dans une proportion supérieure à 1,5 kg pour 10 mètres carrés.

La poudre de sabot et de corne dure un an. C’est la plus grande source d’azote. Le démarrage est lent. Il n’y a pas de résultat notable avant quatre à six semaines. [6]

La terra preta - terre noire des indiens (par Perrine et Charles Hervé-Gruyer)

En brésilien, terra preta signifie « terre noire ». Au XIXe siècle, des scientifiques ont été interpellés par la découverte, en différents points du bassin amazonien, de taches de terre très noire d’une étonnante fertilité, dont la superficie variait de quelques mètres carrés à plusieurs hectares. Cette terre noire pouvait produire des récoltes substantielles pendant plusieurs dizaines d’années sans s’épuiser. Cela était en totale contradiction avec ce que l’on savait des terres amazoniennes : des sols latéritiques pauvres et lessivés par les pluies abondantes, impropres à l’agriculture. Une question s’est alors posée : ces zones de terra preta avaient-elles autrefois soutenu une agriculture intense, et donc des populations importantes ? Pourtant, les Amérindiens subsistant au XIXe siècle ne formaient que des groupes épars, de faible densité… Fallait-il accorder du crédit aux récits des conquistadors espagnols : lors de la première descente du fleuve Amazone, ils avaient décrit des villes importantes et très peuplées, ce qui avait ensuite été perçu comme autant d’affabulations ? La présence de la terra preta semble attester l’existence de denses peuplements amérindiens, qui n’auraient pas survécu à la rencontre des Blancs.

L’étude scientifique de la terra preta montre qu’il s’agit bel et bien d’anthroposols – de sols créés par les humains. Ils contiennent une forte teneur en charbon de bois provenant de brûlis de la végétation lors de la mise en culture, mais aussi des restes de la combustion des foyers domestiques. Leur création est fort ancienne et date de temps précolombiens. Cette terre noire forme une couche qui a jusqu’à plusieurs mètres d’épaisseur !

Son extraordinaire fertilité provient du charbon de bois contenu dans la terre, qui lui donne aussi sa couleur. En soi le charbon de bois n’est pas un fertilisant, mais il contient un nombre extrêmement élevé de microcavités qui améliorent considérablement la capacité des sols à retenir l’eau, tout en le protégeant du lessivage, car ces microcavités sont autant de niches pour les bactéries et les nutriments.

Depuis quelques années l’enrichissement des sols en charbon de bois est testé avec succès, notamment en zone tropicale pour restaurer des terres dégradées. Le charbon de bois fabriqué pour cet usage a été baptisé biochar en anglais (contraction de bio charcoal, « charbon de bois bio »). Sa fabrication est simple : les procédés varient, mais le principe est de brûler à basse température des matériaux organiques en l’absence d’oxygène. Ces matériaux peuvent être du bois, mais aussi des déchets comme les résidus de canne à sucre après broyage ou de la balle de ris, qui se trouvent utilement valorisés. Le biochar est ensuite incorporé au sol. Il n’est en principe pas dégradé par la vie microbienne du sol et peut rester en place des siècles durant comme la terra preta amazonienne.

Les micro-organismes efficaces – ME en français, EM en anglais (par Perrine et Charles Hervé-Gruyer)

Depuis des temps immémoriaux, les paysans japonais s’intéressaient à des formes de fertilité invisibles et pourtant terriblement puissantes. Des siècles avant l’invention du microscope et la découverte de la vie bactérienne, ces paysans réalisaient, chez eux, des cultures de micro-organismes utiles au sol, véritables « potions magiques ». En stimulant la vie microbienne de leurs terres, ils jouaient, de manière subtile et élégante, avec un minimum d’efforts, sur les forces invisibles qui gouvernent la grande alchimie de la fertilité. Lorsque l’on sait qu’une cuillère à soupe de sol sain contient jusqu’à 1000 milliards de micro-organismes, on comprend l’efficacité d’une approche qui favorise la multiplication de ces invisibles auxiliaires.

Charles et Perrine Hervé-Gruyer ont pu constater que des semis de graines de betteraves dans des bacs identiques, si ce n’est que le terreau de l’un d’eux avaient été enrichi avec de la terra preta imbibée d’une solution de micro-organismes, présentaient au bout de trois semaines une différence frappante : dans le bac enrichi aux micro-organismes les plantules étaient deux à trois fois plus hautes que leurs consœurs !

On trouve depuis quelques années dans le commerce différents fertilisants, liquides ou en granulés, faisant appel aux micro-organismes efficaces (ME en français, EM en anglais). Ce type de fertilisants est autorisé par la réglementation européenne de l’agriculture bio.[7]

 

[1] JOSEPH CHAUFFREY, Mon petit jardin en permaculture, Durable, esthétique et productif !, Éd. Terre vivante.

[2] JOSEPH CHAUFFREY, Mon petit jardin en permaculture, Durable, esthétique et productif !, Éd. Terre vivante.

[3] JEAN-MARTIN FORTIER, Le jardinier-maraîcher, Manuel d’agriculture biologique sur petite surface, Éd.  Écosociété.

[4] ELIOT COLEMAN, Des légumes en hiver, Produire en abondance, même sous la neige, Éd. Actes Sud.

[5] ELIOT COLEMAN, Des légumes en hiver, Produire en abondance, même sous la neige, Éd. Actes Sud.

[6] JOHN JEAVONS, Comment faire pousser plus de légumes que vous ne l’auriez cru possible sur moins de terrain que vous ne puissiez l’imaginer, Éd. Ecology Action.

[7] PERRINE ET CHARLES HERVÉ-GRUYER, Permaculture, Guérir la terre, nourrir les hommes, Éd. Actes Sud.

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